

LE CORPS PARLANT
Xe Congrès de l’ AMP,
Rio de Janeiro 2016
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dans tout tableau perceptif, et c’est lui qui lui donne une qualité, une inertie
spéciale. (…) Le rapport humain au monde a quelque chose de profondément,
initialement, inauguralement lésé. »
p. 199
L’image du corps humain : ce qui donne sa vibration émotionnelle au
langage humain
« Ici intervient un fait précieux que nous manifeste la cybernétique – quelque
chose n’est pas éliminable de la fonction symbolique du discours humain, et
c’est le rôle qu’y joue l’imaginaire. Les premiers symboles (…) sont issus d’un
certain nombre d’images prévalentes – l’image du corps humain, l’image d’un
certain nombre d’objets évidents (…). Et c’est ce qui donne son poids, son
ressort, et sa vibration émotionnelle, au langage humain. »
p. 352
Le Séminaire
, livre III,
Les psychoses
(1955 - 1956). Paris, Seuil, 1986
Corps propre, matériel imaginaire du discours
« Puisqu’il s’agit (…) du discours imprimé, de l’aliéné, que nous soyons dans
l’ordre symbolique est donc manifeste. (…) Quel est le matériel même de
ce discours ? (…) D’une façon générale, le matériel, c’est le corps propre. La
relation au corps propre caractérise chez l’homme le champ en fin de compte
réduit, mais vraiment irréductible, de l’imaginaire. Si quelque chose correspond
chez l’homme à la fonction imaginaire telle qu’elle opère chez l’animal, c’est tout
ce qui le rapporte d’une façon élective (…) à la forme générale de son corps où
tel point est dit zone érogène. »
p. 19-20
L’ego, corps agrégé dans l’aliénation imaginaire
« (…) le moi humain, c’est l’autre, et (…) au départ le sujet est plus proche de
la forme de l’autre que du surgissement de sa propre tendance. Il est à l’origine
collection incohérente de désirs – c’est là le vrai sens de l’expression
corps morcelé
– et la première synthèse de l’ego est essentiellement
alter ego
, elle est aliéné. Le
sujet humain désirant se constitue autour d’un centre qui est l’autre en tant qu’il
lui donne son unité. »
p. 50
Disjonction du discours, corps morcelé
« Moi la truie, je viens de chez le charcutier, je suis déjà disjointe, corps morcelé,
membra disjecta
, délirante, et mon monde s’en va en morceau, comme moi-
même. »
p. 64
La dimension imaginaire, le corps et le moi
« Il y a l’altérité de l’Autre qui correspond au S, c’est-à-dire le grand Autre, sujet
qui n’est pas connu de nous, l’Autre qui est de la nature du symbolique, l’Autre
auquel on s’adresse au-delà de ce qu’on voit. Au milieu, il y a les objets. Et puis,
au niveau du S, il y a quelque chose qui est de la dimension de l’imaginaire, le
moi et le corps, morcelé ou pas, mais plutôt morcelé. »
p. 68
Perte de la garantie de l’Autre, morcellement du corps
« Nous aurons à structurer la relation de ce qui garantit le réel dans l’autre, c’est-
à-dire la présence et l’existence du monde stable de Dieu, avec le sujet Schreber
en tant que réalité organique, corps morcelé. Nous verrons (…) qu’une grande
partie de ses fantasmes, de ses hallucinations, de sa construction miraculeuse ou
merveilleuse, est faite d’éléments où se reconnaissent clairement toutes sortes
d’équivalences corporelles. »
p. 82
Dévoilement de la dialectique du corps morcelé
« Le rapport du sujet au monde est une relation en miroir. (…) Dieu, avec
tout ce qu’il comporte (…) et Schreber lui-même d’autre part, en tant que
littéralement décomposé en une multitude d’êtres imaginaires qui poursuivent
leurs va-et-vient et transfixions diverses, sont deux structures qui se relaient
strictement. Elles développent d’une façon très attachante pour nous, ce qui
n’est jamais qu’élidé, voilé, domestiqué, dans la vie de l’homme normal – à
savoir la dialectique du corps morcelé par rapport à l’univers imaginaire. »
p. 101
Forclusion du corps primordial de signifiant
« De quoi il s’agit quand je parle de
Verwerfung
? Il s’agit d’un signifiant
primordial dans des ténèbres extérieures (…). Il s’agit d’un processus
primordial d’exclusion d’un dedans primitif, qui n’est pas le dedans du
corps, mais celui d’un premier corps de signifiant. (…) C’est à l’intérieur de
ce corps primordial que Freud suppose se constituer le monde de la réalité,
comme déjà ponctué, déjà structuré en termes de signifiants. »
p. 171
L’anatomie imaginaire et les symptômes hystériques
« La question du sujet que j’ai évoqué la dernière fois tournait autour du
fantasme de grossesse. (…) On sait depuis longtemps que le morcellement
anatomique, en tant que fantasmatique, est un phénomène hystérique. Cette
anatomie fantasmatique a un caractère structural (…). C’est toujours d’une
anatomie imaginaire dont il s’agit. »
p. 201
Jacques Lacan