

LE CORPS PARLANT
Xe Congrès de l’ AMP,
Rio de Janeiro 2016
153
152
Parole de vérité qui s’énonce par le corps
« Nous sommes donc amenés par la découverte freudienne à écouter dans le
discours cette parole qui se manifeste à travers, ou même malgré, le sujet. Cette
parole, il nous le dit non seulement par le verbe, mais par toutes ses autres
manifestations. Par son corps même, le sujet émet une parole, qui est, comme
telle, parole de vérité, une parole qu’il ne sait pas même qu’il émet comme
signifiante. C’est qu’il en dit toujours plus qu’il ne veut en dire, toujours plus
qu’il ne sait en dire. »
p. 292
Le Séminaire
, livre II,
Le moi dans la théorie de Freud et dans la
technique de la psychanalyse
(1954 - 1955). Paris, Seuil, 1978
Corps morcelé et son unité dans l’autre
« Le corps morcelé trouve son unité dans l’image de l’autre, qui est sa propre
image anticipée – situation duelle où s’ébauche une relation polaire, main non-
symétrique. »
p. 72
L’homme a un corps
« C’est très drôle (…) – l’homme a un corps. (…) Ça fait plus sens pour nous
que pour n’importe qui, parce que, avec Hegel et sans le savoir, pour autant
que tout le monde est hégélien sans le savoir, nous avons poussé extrêmement
loin l’identification de l’homme avec son savoir, qui est un savoir accumulé. Il
est tout à fait étrange d’être localisé dans un corps, et on ne saurait minimiser
cette étrangeté, malgré qu’on passe son temps à faire des battements d’ailes en
se vantant d’avoir réinventé l’unité humaine, que cet idiot de Descartes avait
découpée. »
p. 93
L’image de son corps, principe de toute unité que l’homme perçoit dans les
objets
« Qu’ai-je essayé de faire comprendre avec le stade du miroir ? Que ce qu’il y
a en l’homme de dénoué, de morcelé, d’anarchique, établit son rapport à ses
perceptions sur le plan d’une tension tout à fait originale. C’est l’image de son
corps qui est le principe de toute unité qu’il perçoit dans les objets. (…) C’est
toujours autour de l’ombre errante de son propre moi que se structureront tous
les objets de son monde. »
p. 198
Le rapport humain au monde a quelque chose d’inauguralement lésé
« L’objet est toujours plus ou moins structuré comme l’image du corps du
sujet. Le reflet du sujet, son image spéculaire, se retrouve toujours quelque part
Jacques Lacan
Des images du corps humain, coïncidence entre imaginaire et réel
« L’imaginaire et le réel jouent au même niveau. (…) Il s’agit justement de cela –
d’une coïncidence entre certaines images et le réel. De quoi d’autre parlons-nous
quand nous évoquons une réalité orale, anale, génitale, c’est-à-dire un certain
rapport entre nos images et les images ? Ce n’est rien d’autre que les images du
corps humain, et l’hominisation du monde, sa perception en fonction d’images
liées à la structuration du corps. »
p. 161-162
Le corps, inducteur du désir
« Le sujet repère et reconnaît originellement le désir par l’intermédiaire, non
seulement de sa propre image, mais du corps de son semblable. (…) C’est pour
autant que c’est dans le corps de l’autre qu’il reconnaît son désir que l’échange
se fait. C’est pour autant que son désir est passé de l’autre côté qu’il s’assimile le
corps de l’autre et qu’il se reconnaît comme corps. »
p. 169
Corps, désir morcelé, corps, idéal de soi
« Le corps comme désir morcelé se cherchant, et le corps comme idéal de
soi, se reprojettent du côté du sujet comme corps morcelé, pendant qu’il voit
l’autre comme corps parfait. Pour le sujet, un corps morcelé est une image
essentiellement démembrable de son corps. »
p. 171
L’ego, surface du corps
« Quand Freud parle de l’ego, il (…) souligne que ça doit avoir le plus grand
rapport avec la surface du corps. Il ne s’agit pas de la surface sensible, sensorielle,
impressionnée, amis de cette surface en tant qu’elle est réfléchie dans une forme.
Il n’y a pas de forme qui n’ait de surface, une forme est définie par la surface
– par la différence dans l’identique, c’est-à-dire la surface. L’image de la forme
de l’autre est assumée par le sujet. C’est, située en son intérieur, cette surface
grâce à quoi s’introduit dans la psychologie humaine ce rapport à l’au-dehors de
l’au-dedans par où le sujet se sait, se connaît comme corps. (…) L’homme se sait
comme corps, alors qu’il n’y a après tout aucune raison qu’il se sache, puisqu’il
est dedans. »
p. 192-193
Le corps, valeur d’aliénation, engluement de la liberté
« C’est dans une sorte d’engluement corporel de la liberté que s’exprime la
nature du désir. Nous voulons devenir pour l’autre un objet qui ait pour lui la
même valeur de limite qu’a, par rapport à sa liberté, son propre corps. »
p. 242