

LE CORPS PARLANT
Xe Congrès de l’ AMP,
Rio de Janeiro 2016
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de Jérémie, paragraphes 24 et 25 du chapitre IX, qui a fait au cours des
âges quelques difficultés aux traducteurs car le texte hébreu se traduirait-
Je
châtierai tout circoncis dans son prépuce
. (…) Ce dont il s’agit n’est point, loin
de là, localisé à ce petit bout de chair qui fait l’objet du rite. (…) la séparation
essentielle avec une certaine partie du corps, un certain appendice, devient
symbolique d’une relation fondamentale au corps propre pour le sujet désormais
aliéné. »
p. 247
L’objet perdu est corps
« Objet perdu aux différents niveaux de l’expérience corporelle où se produit sa
coupure, c’est lui qui est le support, le substrat authentique, de toute fonction
de la cause. Cette part corporelle de nous-mêmes est, essentiellement et par
fonction, partielle. Il convient de rappeler qu’elle est corps et que nous sommes
objectaux, ce qui veut dire que nous ne sommes objets du désir que comme
corps. Point essentiel à rappeler, puisque c’est l’un des champs créateurs de la
dénégation que de faire appel à quelque chose d’autre, à quelque substitut. »
p. 249-50
Il y a dans le corps, du fait de l’engagement dans la dialectique signifiante,
quelque chose de sacrifié et d’inerte : la livre de chair
« Il ne s’agit pas du corps en tant qu’il nous permettrait de tout expliquer par
une sorte d’ébauche de l’harmonie de
l’Umwelt
et de
l’Innenwelt
, c’est qu’il y a
toujours dans le corps, du fait de cet engagement dans la dialectique signifiante,
quelque chose de séparé, quelque chose de sacrifié, quelque chose d’inerte, qui
est la livre de chair. »
p. 254
L’homme aux loups
« Dans la révélation de ce qui apparaît à l’homme aux loups par la béance et le
cadre - préfigurant ce dont j’ai fait une fonction - de la fenêtre ouverte, et qui
est identifiable en sa forme à la fonction du fantasme sous son mode le plus
angoissant, où est l’essentiel ? (…) Il est là dans la réflexion même de l’image,
qu’il supporte d’une catatonie qui n’est point autre chose que celle même du
sujet, l’enfant médusé par ce qu’il voit, paralysé par cette fascination au point
que l’on peut concevoir que ce qui, dans la scène, le regarde, et qui est invisible
d’être partout, n’est rien d’autre que la transposition de l’état d’arrêt de son
propre corps, ici transformé en cet arbre, l’arbre couvert de loups, dirions-nous,
pour faire écho à un titre célèbre. (…) Cette jouissance (…) est là présentifiée
sous cette forme érigée. Le sujet n’est plus qu’érection dans cette prise qui le fait
phallus, le fige tout entier, l’arborifie. »
p. 301-302
La photographie : possibilité de détacher du corps, l’image
« Ajoutons-y simplement ce qui connote (…) la possibilité de détacher du corps
l’image, je dis son image spéculaire, l’image du corps, et de la réduire à l’état
cessible, sous forme de photographies, ou même de dessins - à savoir le heurt,
la répugnance, voire l’horreur que provoque dans la sensibilité le surgissement
tout soudain de cet objet, et sous une forme à la fois indéfiniment multipliable
et possible à répandre partout - avec le refus de laisser prendre cette image, dont
Dieu sait, c’est le cas de le dire, où elle pourra aller ensuite. »
p. 364-365
Le Séminaire
, Livre XI,
Les quatre concepts fondamentaux de la
psychanalyse
(1963 - 1964). Paris, Seuil, 1973
L’intégration de la sexualité à la dialectique du désir
« L’intégration de la sexualité à la dialectique du désir passe par la mise en jeu
de ce qui, dans le corps, méritera que nous le désignions par le terme d’appareil
- si vous voulez bien entendre par là ce dont le corps, au regard de la sexualité,
peut s’appareiller, à distinguer de ce dont les corps peuvent s’apparier. Si tout est
embrouillis dans la discussion des pulsions sexuelles c’est qu’on ne voit pas que
la pulsion sans doute représente, mais ne fait que représenter, et partiellement, la
courbe de l’accomplissement de la sexualité chez le vivant. Comment s’étonner
que son dernier terme soit la mort? Puisque la présence du sexe chez le vivant est
liée à la mort. »
p. 161
La lamelle
« Cette lamelle, cet organe, qui a pour caractéristique de ne pas exister, mais
qui n’en est pas moins un organe, c’est la libido. C’est la libido, en tant que
pur instinct de vie immortelle, de vie irrépressible, de vie qui n’a besoin, elle,
d’aucun organe, de vie simplifiée et indestructible. C’est ce qui est justement
soustrait à l’être vivant de ce qu’il est soumis au cycle de la reproduction sexuée.
Et c’est de cela que sont les représentants, les équivalents, toutes les formes que
l’on peut énumérer de l’objet a. »
p. 180
Les zones érogènes sont liées à l’inconscient car c’est là que s’y noue la
présence du vivant
« Le rapport à l’Autre est justement ce qui, pour nous, fait surgir ce que
représente la lamelle - non pas la polarité sexuée, le rapport du masculin au
féminin, mais le rapport du sujet vivant à ce qu’il perd de devoir passer, pour sa
reproduction, par le cycle sexuel. (…) La lamelle a un bord, elle vient s’insérer
sur la zone érogène, c’est-à-dire sur l’un des orifices du corps, en tant que ces
Jacques Lacan