

LE CORPS PARLANT
Xe Congrès de l’ AMP,
Rio de Janeiro 2016
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« brute » pour ainsi dire, du « moins » qu’il faut introduire pour expliquer le
privilège de l’image du corps propre chez l’être humain (…). Sans développer
davantage, je dirai ici que la version plus complexe de ce « moins » premier n’est
pas chez Lacan le déficit organique, mais que c’est la castration. (…) dans l’axe
diachronique (…) il apparaît qu’il y a d’abord l’intérêt pour l’image du corps
propre et que la castration s’introduit seulement après, sur l’axe temporel. »
p. 97
« C’est sur l’image du corps de l’autre que Freud écrit la castration »
p. 98
Le support fondamental des images du corps des autres et du corps propre
est le Nom-du-Père
« C’est dire que le support fondamental des images du corps des autres et du
corps propre est le Nom-du-Père. (…) Comme contre-exemple, nous voyons
les dérangements perceptifs dans les psychoses. Quand nous prenons le cas de
Schreber, nous voyons que, quand pour lui la libido se retire du monde, l’image
des autres se délibidinalise et il ne perçoit plus que des « ombres d’hommes ».
(…) Et quand dans un mouvement inverse, l la libido envahit l’image, nous
voyons en lui son extrême jouissance narcissique. Après avoir expérimenté le
retrait de la libido des images des autres, nous observons la concentration de
libido dans l’image du corps propre, et son image est alors envahie, pour le dire
ainsi, de libido non castrée. Pour cette même raison, il perçoit l’image du corps
propre comme féminin, comme doté d’une jouissance qui ne se réduit pas à la
jouissance phallique, d’une jouissance qui l’envahit totalement. »
p. 99
L’image du corps peut fonctionner comme un signifiant
« Evidemment nous observons aussi quelque chose de ces phénomènes dans
l’hystérie, en tant que pour nous le sujet hystérique, en tant que pour nous
le sujet hystérique est par excellence une faille, un manque de signifiant
représentatif dans l’Autre. C’est pourquoi l’image du corps propre peut
fonctionner et avoir une importance maximale comme bouchon du manque de
signifiant du sujet. Cette formule de référence nous permet d’ouvrir ce chemin
suivant lequel l’image du corps peut fonctionner comme un signifiant. »
p. 99
Dans l’hystérie, le sujet se fait représenter dans l’Autre par l’image de son
corps propre
« Pour comprendre la place distinguée que tient l’image du corps propre dans
l’hystérie, nous pourrions dire que le sujet se fait représenter dans l’Autre par
l’image de son corps propre, de telle manière que cette image et sa manipulation
fonctionnent comme un message à l’Autre, et, à la fois, dépendent du message
reçu de l’Autre. »
p. 99
Dans le surmoi des forces armées, il y a un pouvoir de suggestion sur
l’image du corps
« Dans toute une catégorie de cas de névrose obsessionnelle nous pouvons
observer le soin extrême de l’image du corps propre, au point qu’elle apparaît
parfois totalement signifiantisée et traduit dans l’imaginaire le domaine du
grand Autre, comme si elle fixait les traits obligatoires de l’image que le sujet
doit donner de son corps. On notera, par exemple, le soin que toutes les forces
armées du monde apportent à l’image de leurs soldats. (…) On pourrait se dire
que dans le surmoi des forces armées il y a un « prenez soin de ! » et un pouvoir
de suggestion sur l’image du corps. »
p. 99
L’image du corps peut prendre la valeur d’un objet excrémentiel
« Dans la névrose obsessionnelle et dans la névrose en général nous pouvons
voir au contraire, que l’image du corps peut prendre la valeur d’un objet
excrémentiel, quand ce qui se montre est une négligence provocatrice de cette
image. »
p. 99
L’image du corps traduit toujours la relation du sujet avec la castration
« J’ai dit qu’elle pouvait prendre un valeur de signifiant, de signifiant chiffré,
étant la limite de toutes les figures sociales qui impliquent que l’on donne une
image totalement standardisée ; mais elle peut aussi avoir une valeur d’objet.
On pourrait se demande si nous ne voyons pas quelque chose comme ça dans
l’anorexie (…). Dans la boulimie, (…) l’image du corps est sacrifiée, (…)
l’amour narcissique est sacrifiée à la jouissance orale. (…) l’image du corps
traduit toujours (…) la relation du sujet avec la castration. Le secret de l’image,
le secret du champ visuel, c’est la castration. »
p. 100
L’image idéalisé du corps est celle d’un corps où il n’y a ni jouissance, ni
castration
« La fascination, l’enchantement de la représentation idéalisée du corps dans les
sculptures grecques nous offrent une image d’homéostase parfaite, c’est-à-dire
l’image d’un corps sans jouissance et sans castration. (…) L’image idéalisé du
corps est celle d’un corps où il n’y a ni jouissance, ni castration. »
p. 100
Le christianisme nous fait adorer quelque chose de la castration
« Nous avons aussi les représentations du Christ adulte sur la croix, images
d’un corps torturé qui aurait été pour les Grecs un motif d’horreur et de
méconnaissance absolue. C’est ce que Nietzsche considérait comme le
Jacques-Alain Miller